Stage d’aspirant guide estival, l’apprentissage des fondements du métiers de guide.

Stage d’aspirant guide estival, l’apprentissage des fondements du métiers de guide.

Il pleut. La tête enfoui dans mon oreiller qui pue le renfermé, j’écoute les gouttes de pluie résonner sur les vieilles tôle du bivouac Fiorio. Il est 2h quand le réveil sonne. Je n’ai pas envie. Je me doute que dehors l’ambiance doit être bien glauque. La porte mal fermée ou plutôt vieilli par les années de soleil brulant et les tempêtes de neige successives laisse un jour large comme la main ou j’entraperçois cette brume blafarde qui colle au relief dans cette nuit pas tout à fait noire.

Que faire ?

Surtout rien. Rester sous les couvertures grattantes et attendre encore une heure en espérant que ce crachin breton s’en ira arroser les mauvaises vignes du Valais.

Je pense - je rêve. J’aime ce moments ou mon corps est reposé, il est prêt à partir et les contraintes de la météo m’imposent à rester sous la chaleur. Je me laisse porter par mes songes qui peuvent aller dans les plus belles faces de mes désirs. Moment privilégié ou je sais qu’il faudra en sortir mais je laisse l’idée murir de la raison. Pourquoi ? Pour où ?

Hier nous sommes montés à ce petit bivouac du Dolent construit en l’honneur de Cesare Fiorio. Compagnon de Carlo Ratti (vous savez celui de la Ratti-Vidal à la Noire de Peuterey), il a été un pionnier de l’alpinisme sans guide. Fiorio son histoire est aussi triste qu’admirable par son dévouement à soutenir un compagnon blesser dans le tempête au point d’en perdre un jambe de gelure. Comble du clin d’œil à cet alpiniste peu connu, nous sommes ici pendant la semaine de formation du stage d’aspirant guide. Semaine ou les futurs aspirant emmène leur premier « clients » en montagne. Une semaine passionnante pour eux, c’est la première fois que Gaby, Laurent et Adrien prennent la responsabilité d’emmener des compagnons en montagne. Alexandra, Hugo et Vladan se prêtent avec grand plaisir à cet exercice. 

Pour moi, ces lieux sont chargés d’histoire. Dans les années 70 / 80 mes parents gardaient le camping du Club Alpin à Arnouva dans le Val Ferret Italien. Alors toutes ces sommets, pentes arêtes étaient notre terrain d’apprentissage de l’alpinisme. Chez mes parents trône encore une image de la fratrie en knikners au pied de l’arête Sud du Dolent. Les décennies ont passé, le camping à disparu pour laisser un vallée belle sans immobilier mais le bivouac Fiorio est toujours là avec ces tôles qui grincent, son bois brulés sur sa façade Sud et à l’intérieur cette table centrale entouré des couchette suspendu. Le vernis du bois est encore tenace. Appart quelques doux abrutis qui part fierté ont inscrit leur noms et la date de leur passage dans le bois des bac-flancs, rien n’a changé. Je me revois sautant de lit en lit avec mes sœurs, n’imaginant pas ou nous irions le lendemain.

Aujourd’hui même si le temps tourne au beau, la neige n’aura pas regelé. En ce début d’été les quantités de neige sont impressionnante. Cette blancheur étalée sur les alpes donne à rêver à de belles ascension neigeuse. Et pourtant ! Comme un tapis épais cette neige n’a pas gelée en profondeur depuis qu’elle est tombée. Alors quand la froidure diurne ne permet pas de durcir la surface, nous pataugeons dès les premiers pas. Cette pluie n’arrangera pas la sauce c’est une certitude.

3h – le temps n’a pas changé et j’ai cette fois plongé dans les ténèbres. Seul mon inconscient se rappelle ou j’ai été et avec qui j’ai partagé ces moments de sommeil. Quand le réveil de 5h à sonner j’ai bondi. Est-ce la fraicheur qui s’est glissé par l’interstice de la porte qui m’a fait soupçonner que dehors était différent. Je ne sais pas. Mais quand je pousse la porte je suis surpris. Il n’y a plus aucun nuage dans le ciel.

Il n’est plus temps ni les conditions pour aller au Dolent. Nous irons traverser les pointes des Allobroges. Le Crepillon plus haut nous repoussa. Sa face sud est un immense empilement de pierres enchâssés dans une terre en dégèle. Ici la notion de permafrost qui se réchauffe est bien présente. Après 100m dans la face et à la vue de cette roche enchâssée j’ai préféré fuir.

Plus bas les pointes orientales des Allobroges sont d’un esthétisme rare. Comme les lances de ce peuples guerrier Celte de l’Antiquité installé dans les Alpes du Nord appelé Allobryges, elles s’élancent finement dans le ciel. En longeant la face Sud nous trouvons une ligne d’escalade à remonter pour rejoindre l’arête. La suite est technique, fine d’équilibre parfois besogneuse pour pousser les blocs branlant vers le bas. Mais la vue et le cheminement gratifiant.

Alors ils bossent les jeunes. Dois-je passer devant ou derrière sur cette portion d’arête ? Corde courte ou micro-longueur ? Relais doublé ou simple corde passé derrière le béquet ? Tant de technique qui ne doivent pas supplanter la communication avec son partenaire de cordée.

Le retour dans la vallée est glissant et doux. Que c’est bon ces descentes ou les semelles se laissent errer sur la neige vagueler quand en même temps nous en profitons pour débattre de l’avenir de ce métier si prenant.

Merci Gaby, Laurent et Adrien pour votre engagement

Merci Alexandra, Hugo et Vlad pour votre confiance.